Nous avons passé le mois d’Août 2018 à sillonner les Alpes entre Chamonix et Zermatt en Suisse. Si Célia avait déjà eu l’occasion de découvrir la Haute-Savoie au cours de son enfance, en randonnant en famille du Lac Blanc au Glacier des Bossons en passant par l’ascension du Mont Buet, pour moi, c’était une grande première ! A l’origine, on avait prévu de boucler en dix jours le trek du Tour du Mont-Blanc, un itinéraire de randonnée réputé autour du célèbre massif passant par la France, l’Italie et la Suisse. Une sombre histoire d’ampoule infectée nous a contrainte à revoir nos plans et à opter pour des randonnées à la journée et des nuits en bivouac à proximité des refuges dans la vallée de Chamonix. Ce jour-là, nous bouclons une nouvelle fois nos sacs de backpackeuses pour passer une nuit en bivouac à proximité du Refuge Albert 1er dans la vallée de Chamonix.
Notre randonnée jusqu’au Refuge Albert 1er
Voilà presque une semaine que nous vadrouillons au grès de nos envies et de notre humeur dans la vallée de Chamonix. Le premier jour de notre voyage, nous avons rejoint la Mer de Glace depuis la vallée avant de longer le Balcon Nord jusqu’au Refuge du Plan de l’Aiguille Cette randonnée nous a permis de nous mettre en jambe et d’oublier notre première étape ratée du Tour du Mont-Blanc, des Houches aux Contamines. Les jours suivants étaient consacrés à la découverte de l’Aiguille du Midi et du Glacier d’Argentière. On a très vite pris nos marques dans la vallée. Éveillées au petit matin, lovées dans nos fines doudounes, un café entre les mains, Célia et moi avons pris l’habitude d’observer avec envie les alpinistes en partance pour l’Aiguille avant de nous lancer à notre tour sur ses chemins de randonnée.
Ce jour-là, nous émergeons de la tente au petit matin. Voilà plusieurs jours que nous dormons dans de petits campings au coeur de la vallée et l’envie de nature, d’autonomie et d’isolement commence à pointer le bout de son nez. La veille, à la lueur de nos frontales, nous avons étudié la carte des glaciers et massifs environnants pour dénicher une randonnée et un lieu de bivouac attenant. Sans trop tergiverser, notre choix s’est arrêté sur le Refuge Albert 1er, un refuge de montagne surplombant le glacier du Tour. Alors ce matin, on boucle une nouvelle fois nos sacs à dos de randonnée avant de grimper dans le TER du Mont-Blanc Express qui sillonne la vallée pour descendre à la gare de Charamillon au village du Tour. On décide de se simplifier la vie en empruntant sur la première partie du trajet la remontée mécanique du col de Balme. Le chemin de randonnée longe des pistes de VTT de descente et le paysage en soi n’a rien de très exceptionnel.
Lorsqu’on s’arrête au col de Balme, le chemin se scinde en deux directions distinctes : la première mène au Refuge Albert 1er, la seconde au Refuge du Col de Balme. On décide de faire un détour par ce dernier afin de profiter du temps qui s’offre à nous et de pousser jusqu’à la Croix de Fer au col des Posettes qui nous permet de profiter d’un panorama sur les sommets, arêtes de montagne et neiges éternelles environnants. Le Refuge du Col de Balme est un petit refuge aux volets rouges. Le long de sa façade d’énormes sacs à dos sont posés. Il s’agit des sacs des randonneurs parcourant le Tour du Mont-Blanc.
Jusqu’au Refuge Albert 1er, le sentier est un chemin en balcon qui serpente le long de la montagne. Plus ou moins étroit, plus ou moins vertigineux par endroit. Dans l’ensemble, le niveau de difficulté est plutôt moyen et la randonnée est familiale. En plus des alpinistes qui passeront la nuit au refuge avant de poursuivre leur route au petit matin vers les sommets, nous croisons quelques familles accompagnées d’enfants en bas âge qui dormiront dans l’une des chambres du refuge avant de redescendre dans la vallée le lendemain matin. Il nous faut une bonne heure de marche avant d’apercevoir au loin le Glacier du Tour, ses crevasses et ses reflets bleutés. Le glacier du Tour a quelque chose d’irréel et d’hypnotique qui me scotche sur place. Et dire que je suis partie jusqu’en Patagonie pour découvrir les champs de glace du nord et du sud du pays sans soupçonner une seule seconde que la France cachait autant de trésors !
Il nous faut une heure de plus avant d’atteindre la moraine qui mène au refuge. Cette partie de l’ascension est moins aisée et le poids de notre sac à dos commence à se ressentir. J’ai les jambes qui flageolent par moment mais à tout instant Celia sait trouver les mots pour me remotiver : tarte à la myrtille et bière du Mont-Blanc, le duo gagnant !
Une nuit en bivouac au Refuge Albert 1er
Lorsqu’on arrive sur la terrasse du refuge, de nombreux alpinistes et randonneurs sont attablés autour d’une bière souvent bien méritée. On ne s’attarde pas très longtemps préférant prendre le temps de planter notre tente, nommée Padattente, à l’arrière du refuge. On déniche un monticule de pierres qui permettra de dormir et de cuisiner sur notre réchaud à l’abri du vent. La terre est dure et, comme souvent, il faut faire preuve d’ingéniosité pour tendre au maximum nos piquets. Notre plateforme surplombe le glacier du Tour et fait face à l’Aiguille du Tour. Au beau milieu des crevasses, on distingue une cordée d’alpinistes en pleine action. On s’arrête quelques instant pour observer le panorama et le massif des Aiguilles Rouges situé de l’autre côté de la vallée. Il n’y a rien à dire. Le refuge Albert 1er est l’un des plus beaux lieux de bivouac de Chamonix.
Deux bâtiments composent le refuge Albert 1er. Le premier est un bâtiment en bois, un peu ancien, réservé aux saisonniers. Le second est une bâtisse plutôt moderne mais sa façade extérieure est plutôt froide et sans charme. Alors que l’intérieur propose une salle commune plutôt cosy : de longues tables en bois permettent aux randonneurs et alpinistes de se retrouver en fin de journée, un vieux poêle permet d’égayer les soirées tandis que dans un coin de la pièce, je déniche une petite bibliothèque. Au-dessus du bar, les noms de plusieurs spécialités régionales, comme les croûtes au fromage, sont inscrites à la craie sur un large tableau noir. Mon ventre gargouille à leur vue et la perspective de mon repas de nouilles chinoises cuites au réchaud accompagnées de miettes thon me semble tout de suite beaucoup moins alléchante.
Lorsque le soleil commence à décliner derrière les montagnes, on se masse comme beaucoup d’autres randonneurs sur la terrasse du refuge pour assister à son coucher. Le glacier du Tour disparaît peu à peu. L’obscurité l’engloutit tout entier. Ses derniers rayons de lumière balaient les montagnes. Leurs contours s’estompent progressivement. On reste là un moment jusqu’à ce que le froid nous rappelle à la réalité. Alors discrètement, on s’esquive. Nos frontales nous permettent de remonter le pierrier jusqu’à notre tente et nous glisser dans nos duvets. Cette nuit-là, notre sommeil sera entrecoupé par les allers et venues des différentes cordées d’alpinistes en route vers les sommets.
Au petit matin, on s’offre le luxe de s’éterniser une nouvelle fois sur la terrasse du refuge, en préparant notre traditionnel café en poudre et notre porridge aux amandes et noisettes. La flamme du réchaud crépite tandis que j’allume le gaz. Nous sommes les dernières à quitter les lieux, nos backpacks sur le dos, pour redescendre dans la vallée. Et tandis qu’on redescend le long de la moraine puis du sentier en menant au col de Balme, je ne cesse de me retourner jusqu’au dernier instant pour profiter du glacier du Tour. Encore une fois, Chamonix aura tenu ses promesses.
Informations pratiques pour dormir au refuge Albert 1er
La période de gardiennage du Refuge Albert 1er s’étend du mois de Juin à la fin du mois de Septembre. Depuis l’arrivée au col de Balme, il faut compter 2 heures de marche pour rejoindre le refuge. L’accès au refuge se fait depuis la gare de Charamillon dans le village du Tour. Depuis Chamonix, le village est très facilement accessible grâce au TER du Mont-Blanc Express. Si vous séjournez dans l’un des hôtels ou campings de la vallée, pensez à demander à votre hébergement la “Carte d’Hôte”. Elle vous permettra d’emprunter gratuitement les transports dans la vallée de Servoz à Vallorcine. Vous n’aurez pas besoin de traces GPS, comme un peu partout à Chamonix, les randonnées sont très bien indiquées. Le refuge propose des hébergements en dortoir pour un peu plus de 30€ la nuitée et dispose d’un champ de pierrier à l’arrière où il est possible de planter gratuitement sa tente tout en profitant des différentes installations proposées. Vous trouverez plus d’informations pour organiser votre nuit en altitude sur le site de la Fédération Française des Clubs Alpins et de Montagne.
2 comments
Magnifique ! 🙂
Merci beaucoup !